De la casse de la fonction publique

Elle est annoncée, amorcée, imminente.
À celles et ceux qui croient pouvoir y échapper, ou qui pensent qu’on ne peut pas s’y opposer, nous disons : sans mobilisation massive, nous serons tous perdants, agents et usagers.

Ne pas s’y opposer revient à cautionner ce qui se prépare.

Après, il sera trop tard. Il n’est plus temps de jouer les autruches !

Les signes se multiplient pour dessiner le monde anti-social dont rêve la bourgeoisie. Dernier exemple en date : payer ses impôts dans les bureaux de tabac à partir du 1er juillet 2020 ! Un nouveau transfert de mission publique au privé. Double bénéfice pour le gouvernement :
– éviter la grogne des buralistes qui voient de moins en moins de fumeurs du fait de l’augmentation du prix du tabac et de la politique anti-tabac ;
– externaliser une mission dévolue à ces fonctionnaires dont nos dirigeants veulent se débarrasser.
Le paiement de l’impôt à la source et la généralisation de la télédéclaration permettent déjà de réduire drastiquement les effectifs des agents des impôts, mais ce n’est pas suffisant, ce n’est jamais suffisant et ça ne sera jamais suffisant pour ces individus qui considèrent les services publics comme une charge insupportable !

En ce qui concerne les agents du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, qu’est-ce qui les attend dans les Directions Départementales des Territoires (et de la Mer) ?

Lors des dernières réunions destinées à informer les chefs des services d’économie agricole, la question de la décentralisation a été clairement posée. Le représentant du ministre a répondu que rien n’était acté et qu’il ne fallait pas s’inquiéter. Bref, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Cette question a aussi été posée au CTM du 9 juillet, avec la même réponse de la part de l’administration.

Or nous avons ensuite appris que le premier ministre, avant la réunion des chefs de SEA et le CTM, avait déjà décidé de transférer 400 ETP de l’État vers les Régions pour les missions relatives au FEADER (voir notre communiqué du 24 juillet). Nous comprenons ainsi que notre ministère ment délibérément aux représentants du personnel (ce n’est pas un scoop, nous avons l’habitude…) mais aussi à ses propres cadres : quel que soit son niveau de responsabilité, chaque agent « bénéficie » du même niveau de mépris !

Le démantèlement des DDI a d’ores et déjà commencé avec la création des secrétariat généraux communs aux directions départementales et aux préfectures. Et voilà que le FEADER est transféré à la région.

Même avec un optimisme de Bisounours®, il est des questions qui ne peuvent pas être tues : ceux qui nous gouvernent ont-ils vraiment conscience de l’impact de leurs décisions ? Rappelons-leur que ces 400 ETP sont en réalité des agents, des familles et des vies qui vont être bouleversées. D’autant plus que 400 ETP ne correspondent pas à 400 agents, ni même 400 postes. En effet, dans ce chiffre il y a des temps partiels et des parties de postes. Combien de personnes – nous parlons de personnes – seront concernées directement et indirectement par ce petit jeu pervers de décentralisation ?

Comment ce transfert va-t-il s’effectuer ? Les agents en poste dans des DDT(M) vont-ils devoir suivre leurs missions ? Que va-t-il se passer pour les agents des DDT(M) éloignées des capitales régionales ? Devront-ils déménager, au risque de sacrifier leur vie de famille ? Que va-t-il advenir des conjoints qui ont un travail ? Et de leurs enfants ?

Et pour les usagers des territoires éloignés des métropoles ? Qui peut croire que la numérisation massive des procédures pourra remplacer l’accueil physique dans des services de proximité ?

Ces questions paraissent certainement incongrues aux oreilles du gouvernement. Quoi ? Qui parle d’agents, de familles, de déménagement ? Il est seulement question de transfert d’ETP !

Aujourd’hui, dans les services, nous croisons des collègues complètement découragés, démotivés, paniqués, défaitistes, en colère. Comment peut-on espérer rendre un service de qualité aux usagers dans ces conditions, avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête ?

Une fois les SG transférés aux préfectures et les agents FEADER aux régions, il ne restera plus qu’à transférer les « derniers mohicans » des services d’économie agricole (agents PAC 1er pilier) à l’ASP (projet bien dans les tuyaux) et le ministère de l’agriculture aura désormais liquidé son échelon départemental.

Nous ne parlons ici que du ministère de l’agriculture, mais les autres ne sont pas en meilleure forme, et tous y passeront, chacun son tour, sauf peut-être celui de l’intérieur (maintien de l’ordre) et celui de la justice (embastillage des fauteurs de troubles). Ce n’est qu’une question de temps…

À moins que le gouvernement rencontre enfin la résistance citoyenne que sa politique régressive mérite !